Par Golem
Vrai ou faux ? Info ou intox ?
8h du matin. Les
infos : le Ministère des Affaires étrangères confirme que les restes
humains découverts près de l’aéroport de N’Djamena ont été formellement
identifiés. Ce sont bien ceux du Président Tombalbaye exécuté lors du coup
d’Etat. Le Président et le Conseil des Ministres en activité ont décidé de lui
donner des obsèques nationales.
Je pense à son fils
aîné et à ses enfants que j’ai bien connus.
Deux jours plus tard,
un télégramme arrive : je suis invitée à la cérémonie. Un envoyé officiel
va me contacter pour les détails.
Deux hommes sonnent à
ma porte. Ils se présentent. Ils viennent du Ministère de la Coopération. Au
terme d’une petite conversation, ils me demandent de remettre une lettre
cachetée au fils Garbaye que je connais bien.
Le même jour, un
négociateur d’un grand groupe pétrolier me demande le même service et me laisse
entendre que je recevrai une bonne commission.
Les jours suivants, cela continue, délégué après délégué, trust après
trust. J’ai reçu mon billet, pour la cérémonie. Je suis sur l’estrade
officielle, à côté d’une fille Tombalbaye connue à Paris. J’entends les
chuchotements : qui est-elle ? Pourquoi est-elle ici ?
J’apprends que chacun devra dire quelques mots. Je décide de parler de
réconciliation politique, de pardon et d’espoir pour le futur. Lorsque je
finis, quelques secondes de grand silence, puis un tonnerre d’applaudissements.
Lors de la réception, je suis très entourée ; tout le monde veut me
parler, me revoir, me charger d’une mission ou d’une médiation. L’archevêque
veut me charger d’une étude compte-tenu de mes très bons rapports avec l’une
des ethnies assez peu connues. Le responsable local des fonds des Nations-Unies
pour le Développement veut me confier l’organisation et la mise en place de
projets destinés aux femmes, projets spécifiques et concertés. L’archevêque
insiste de son côté et m’assure que je l’accompagnerai à Rome pour remettre
moi-même mon (mes) mémoire(s) au Pape. Je vais devenir une voyageuse témoin de
la vie.
Par Krysia
Simplement moi !
On me demande de
parler de vantardise !
En d’autres termes,
on me demande de parler de MOI au naturel et au quotidien.
Mais est-ce être
vantard que de savoir qu’on est féérique dans tous les domaines ?
Non ! C’est
juste un constat ! Je n’y peux rien, je suis née comme cela !
J’ai 25 ans et je
m’appelle Elsève.
Je sais, j’inverse
les chiffres mais je donne cet âge parce que tout le monde s’accorde à ne pas
pouvoir m’en donner plus.
Avant que vous ne me
posiez la question : Non, on ne m’a pas donné le prénom du plus renommé
des produits cosmétiques pour les cheveux ! C’est mon papa qui a nommé sa
gamme comme moi ! Il a toujours été subjugué par mes cheveux de soie.
C’est d’ailleurs pour ça qu’il s’est reconverti en coiffeur-chimiste. Il disait
toujours : « Ma petite Elsève, tu le vaux bien ! ».
Je l’aime bien mon
papa mais il ne m’adule pas autant que maman !
Mes formes vous
éblouissent ? Je me suis tout fait refaire, mais je suis déçue parce
qu’avant j’étais mieux ! Maintenant, je fais du 95 C/60/90. Ou
c’est... 60/90/95 ? J’ai un peu de mal avec les chiffres !
Mais je mesure 1m56
et pour ne jamais l’oublier, j’ai commencé un régime en atteignant ce poids.
Pour mes fringues, je
suis dans « l’air du temps ». Que des marques griffées :
Chemisier
« Cacharel », jupe droite importation directe de nos usines de
Chine : « Zara » je vous le fais avec l’accent du pays, là-bas
elles s’appellent : « Takaèt Mouincon ».
Mes sous-vêtements,
« Chanel n°5 », ils ont une odeur de « coco ».
Si vous n’avez pas le
nez bouché, vous vous en êtes rendu compte !
Mes chaussures à
talons épingle : « Bata » mais pas n’importe lequel : Bata
de chez « Taty », hééé !
Mes accessoires :
diadème de miss, je l’ai depuis l’âge de 4 ans ! Pour dire que je fais
attention à mes affaires !
Sur mon gilet
« Bordeaux », ma broche « Chesnelle ». Ensemble, nous
n’avons pas les mêmes valeurs !
Mon foulard et ma
ceinture j’« Adore » ! Ils m’ont été offerts pas « JP
Gautier » un jour que je lui ai donné l’heure dans le
« Quartier ». On ne s’est vu que 10 minutes mais il est tombé
amoureux !
Ça m’arrive
souvent !
La prochaine fois
qu’on se croisera, il m’offrira des boucles d’oreilles en or 3 carats avec du
zirconium ! Un truc de fou ! Je n’ose pas imaginer combien ça coûte
mais c’est encore plus cher que le diamant ! Si vous ne connaissez pas, ne
vous en voulez pas ! Tout le monde ne peut pas exhiber des offrandes
pareilles !
Et sentez mon parfum
« jalouse » ! Son émanation m’enveloppe si bien !
Bon, en fait,
j’amoindris, j’ai tellement d’humour !
Je compense car
croyez-moi ce n’est pas simple d’être une femme fatale.
Tous les hommes n’en
peuvent plus dès qu’ils me voient.
Pour un simple
sourire accordé, certains ont même dû se … comment dire poliment ? …
agiter leurs bijoux de famille pour remettre leurs idées en place, ou du moins
le peu qu’il leur restait.
Je sais aussi qu’avec
mon niveau d’études, j’en jette et j’en écrase.
C’est pourquoi j’ai
pris le parti, dans une assemblée, de parler le moins possible, pour qu’on
n’entende pas le décalage entre leur babillage et la verve structurée de ma
diction impeccable.
Certes, mon
curriculum vitae est surprenant. Je ne vais tout de même pas me reprocher mon
goût pour les hautes études, ni m’en vouloir si je ne peux pas obtenir une
place de directrice ou de magistrat !
On ne peut pas me
reclasser à un niveau si bas et j’en conviens car je suis humble, délicate,
réservée, autant que remarquable, sublime, mémorable, mais je ne puis le
clamer, modestie oblige !
Vous n’aurez aucun
mal à remarquer rapidement que je suis en décalage constant avec les autres.
J’ai toujours une longueur d’avance, un petit quelque chose dans mon aisance
qui me distingue : je ne suis ni le mouton, ni le berger, je suis la
montagne toute puissante, fascinante.
Je suis la plus
extraordinaire de mon pays et même de ma rue ! Plus précisément la n°1 de
la prison de Réau.
Et oui, je détiens le
record absolu : au tribunal, mes étonnantes qualités ont été votées à
l’unanimité dès le départ par tous les membres du jury ! Du jamais
vu ! Les juges, le procureur et les avocats des deux parties l’on reconnu
et m’ont gratifié du temps maximum !
Il faut dire que
j’étais impressionnante ! Mythique presque !
Voilà un petit
débriefing de mes qualités secondaires, je vous épargne les autres, bien plus
merveilleuses !
Tout ça pour vous
apprendre que désormais, je n’ai plus de contraintes :
Je ne croise plus
d’hommes alors ils ne bavent plus sur leurs chaussures, les femmes que je
côtoie ne me jalousent plus car elles n’ont même pas leur CFG ici. J’imagine
que vous ne savez pas ce que ces initiales veulent dire ?
Tout
simplement : « Certificat des Futurs Gogoles ».
Vous pensez bien que
c’est la première fois que je rate un examen !
Ma simplicité
m’apporte une popularité grandissante chaque jour que Dieu fait, mais toujours
dans un souci de vie idéale, je reste dans ma cellule pour ne pas faire d’ombre
à celles qui cherchent à se faire péniblement des connaissances.
Rien de ce que je
viens de dire n’est vrai, mais il est facile de donner l’illusion d’être une
prout-prout de Paris 16 à celles qui ne veulent pas regarder plus loin que leur
vilain nez.
Par Laurence
La Dame Caméléon et le Château
Il était une fois une Dame Caméléon
qui vivait dans un étrange palais. Pas un palais de verre mais un château de
béton et d’acier.
Les fenêtres de
barreaux s’ouvraient non pas sur des pelouses fleuries mais sur des jardins de
barbelés.
La dame y résidait
parmi une pléthore de femmes, les dames en bleu qui surveillaient et celles qui
étaient observées, examinées, scrutées, disséquées, décortiquées, inspectées
tout au long du jour et de la nuit.
Les femmes étaient
jeunes ou vieilles, il y avait des splendides et des ingrates, des moins jolies
avec un cœur en or, des belles avec du noir à l’âme, des soumises et des
rebelles, des modestes et des vaniteuses, des mûres et des immatures, des
souriantes et des grognons, des fades transparentes et des pestes hurlantes.
Dans ce gynécée, Dame
Caméléon pensait à sa vie d’avant.
Elle était née il y a
bien longtemps, de l’amour de Vénus et d’Apollon, sous une bonne étoile. A sa
naissance, elle avait été dotée par ses marraines les fées de l’intelligence,
la beauté, la délicatesse et bien d’autres atouts encore.
Dès son plus jeune
âge, ses qualités physiques faisaient l’admiration de tous.
Ses yeux noisette
étaient rieurs et lumineux.
Ses cheveux étaient
si doux que certains voulaient toujours les caresser.
Son sourire parfait
s’ouvrait sur des dents blanches qui brillaient au soleil.
Ses mains généreuses
vous réchauffaient dès qu’elles vous touchaient.
Elle avait grandi
dans un univers caravagesque, la musique était baroque ou classique. Papageno
était son ami, le Louvre son aire de jeux …
Elle savait tout
faire, elle réussissait tout, elle avait toujours la réponse à une
question ; son savoir, son expérience étaient sans fin, peut-être en
raison d’un QI qui frisait les 200.
Certes, elle était
née avec une petite cuillère en argent dans la bouche mais ce n’était pas le
plus important.
L’amour
incommensurable de ses parents lui avait permis, en grandissant, de porter un
regard sur les autres dénué de toute méchanceté, agressivité, jalousie,
malveillance.
Pour l’avoir beaucoup
lu, elle était rousseauiste dans l’âme.
Elle avait retenu de
Montesquieu que : « La liberté est le droit de faire ce que les lois
permettent ».
De tous ses voyages
de par le monde elle avait retenu comme l’écrivait La Fontaine :
« Quiconque a beaucoup vu peut avoir beaucoup retenu » ou comme
Goldoni : « Qui n’a pas quitter son pays est plein de
préjugés … »
Elle synthétisait une
vie de liberté de ton et d’attitude. Une nature solaire, une détermination
légère, une élégance rayonnante et juste ce qu’il faut de désinvolture la
caractérisait. Elle avait une inébranlable confiance dans la vie. Elle était
noble de cœur, son regard et son sourire étaient ses atouts.
Ses modus vivendi et
operendi étaient toujours en accord avec elle…
Toujours sauf le jour
noir, le jour maudit de l’accident où une affreuse sorcière l’avait transformée
en Dame Caméléon.
Ce mauvais sort
l’avait amené à survivre dans l’univers dantesque de la maison de béton où se
jouaient et se rejouaient tous les jours les deux premières parties de la
Divine Comédie. Son regard et son sourire étaient ses seules armes.
Dans cet enfer,
personne ne savait qu’en fait elle était une princesse. Des esprits chagrins,
revêches, aigris, intolérants, sans gêne, la traitaient de bourgeoise, pensant
l’insulter ou la blesser.
La Dame Caméléon
riait sous cape, en se disant : « Si elles savaient … »
Ce que les vilaines
ignoraient, c’est que le mauvais sort qui l’avait transformée en caméléon
cesserait le jour où elle quitterait la maison close et qu'alors elle
redeviendrait princesse.
La princesse savait
que, même vivant dans la cour des miracles avec ses compagnes d’infortune, elle
ne ferait jamais sien le vocabulaire des vilaines et ne tomberait pas sous les
fourches caudines de la facilité et de la vulgarité.
Non, la princesse ne
fumera jamais : c’est avec ses amis les livres qu’elle voyage dans les
paradis artificiels.
Non, la princesse ne
dira jamais : « J’te kiffe », son kif elle le trouve dans la
lecture des Béatitudes de St François d’Assise.
Non, la princesse
« ne nique rien ni personne », elle ne veut pas piétiner la beauté de
la langue arabe.
Et pour ce qui est
réellement de « niquer », la princesse préfère faire la bête à deux
dos avec un mâle de son espèce.
Non, la princesse ne
« s’en bat pas les couilles », elle est une femme et elle n’en a pas,
d’ailleurs il n’y a pas d’ovules dans les testicules.
Non, la princesse ne
dira jamais « Wech » mais plus simplement :
« Plaît-il ».
La princesse faisait
fi de toutes ces grossièretés car elle n’avait pas les mêmes valeurs. Elle
savait juste dire aux vilaines avec un grand sourire et dans un doux
euphémisme : « Je vous enquiquine ».
« Le grossier
élève la voix tel un pet à minuit » (proverbe persan).
Par Shinez