vendredi 3 mai 2013

Imaginez quel souvenir vous aimeriez que l’on garde de vous.


Par Krysia
Héritage

Assise à mon bureau, je suis concentrée dans une observation minutieuse. Je suis antiquaire et dois faire l’estimation d’une urne noire et vide avec un motif doré représentant l’éternité.

Mes trois enfants majeurs me rendent visite au travail. L’aîné entame la conversation :

« Maman, nous avons bien réfléchi et c’est en accord que nous nous présentons car nous aspirons, mes frères et moi, à profiter de notre héritage dès à présent. Pourrais-tu convenir des modalités pour y remédier au plus vite, s’il te plaît ? »

Je les contemple un par un et, devant leurs yeux résolus, hausse les épaules et expire tristement. Comment prendre la situation ? Comme un échec d’éducation ? Leur volonté de vouloir me voir vivre longtemps sans souhaiter ma mort ? Une inquiétude de leur part devant ma manière de gérer mes économies ? Une déception immense m’envahit, mais je n’en montre rien.

Je pose l’urne, prends une feuille, la rabat trois fois sur elle-même, marque les plis et donne les coups de ciseaux nécessaires pour en faire huit bouts de papier. Je regarde à nouveau mes fils qui, alignés bien droit devant moi, ne savent pas quoi penser de mon action. Sur un ton calme, je les questionne : « Les enfants, pourriez-vous me dire toutes les qualités qui me définissent à vos yeux ? »

Le plus jeune est le premier à réagir : « Tu es généreuse, voire très généreuse, maman! »

J’écris sur l’un de mes petits papiers : « Générosité ». Le second se lance et propose : « Douce ». Sur un deuxième morceau, je m’empresse d’écrire ma qualification.

Je poursuis ainsi, d’abord jusqu’à ce que j’arrive au bout de ma feuille puis, après m’être réapprovisionnée, jusqu’à ce que mes valeurs soient toutes accordées.

Je relis mes papiers avant de les déposer dans l’urne. Ainsi, je sais que, d’après mes enfants, mes qualités sont : la vertu, la patience excessive, la gentillesse, la tendresse étouffante, la générosité, la persévérance, les aptitudes manuelles et intellectuelles, la fiabilité dans les promesses, la bienveillance, la serviabilité, le raffinement, l’altruisme, la réussite ambitieuse, la douceur, la diplomatie en toutes circonstances et un grand courage.

Rassurée sur l’estime qu’ils ont de moi, je rajoute à titre personnel : « la naïveté », qui n’est certes pas une qualité lorsqu’on en a trop. Je prend mon briquet, allume le dernier de mes papiers avant de le laisser tomber auprès des autres. Le feu consume l’ensemble très rapidement et l’urne se fend. Je confie le vase à mon grand ébahi en lui disant : « Cet objet n’a aucune valeur, sa réaction au feu vient de me le prouver. Je vous l’offre avec tout ce que je représente pour vous et qui vient de brûler, comme ma naïveté ».

Désillusionnés, mes trois enfants ont quitté la salle tandis que, ravie, je sais désormais le souvenir qu’ils garderont de moi. 


Par Simone

La réponse est difficile.

Peut-être est-elle dans mon nom ? Je porte le nom d’une célèbre source en Algérie et mon prénom, Simone - en hébreu Simrah -, signifie « joie ». Mon prénom et mon nom, issus de deux cultures différentes, peuvent être traduits par : « source de joie »/

J’aime bien cette identité. Oui, j’aimerais bien devenir cette eau pure, si nécessaire à l’homme comme l’est le rire - propre de l’homme.

Oui, je souhaite que l’on garde de moi une image gaie. Il semblerait que je sois naïve et que c’est un défaut. Et pourtant : ne vaut-il pas mieux, rire, rêver, espérer ? Croire en la beauté ? Penser que le bien domine le mal ?

J’aimerais que l’on n’oublie pas que je suis agnostique et qu’il y a dans le monde, non pas des religions, mais une même croyance en quelque chose de peut-être divin, que chacun peut traduire, selon ses convictions, ses origines, son éducation et sa philosophie.

J’aimerais tant que les religions ne soient pas sources de guerres mais, au contraire, des rencontres de paix et d’amour.

Oui, je préfère passer pour une utopiste… J’aimerais demeurer cette « utopiste », qui a toujours pensé qu’un tout petit peu peut faire beaucoup.

J’aimerais, comme tout le monde je crois, que l’on dise : «  Celle-là, on l’aimait bien. » Oui, j’aime et j’aimerais aujourd’hui, comme demain, que l’on m’aime !...



1 commentaire:

  1. Merci beaucoup Krysia pour ton joli texte sur la question de l'héritage. Ton histoire est touchante, vrai et mignonne à la fois.

    Bonne continuation à toutes, et bravo !

    Aurélie

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